Depuis la volonté de Spielberg d’animer des dinosaures, cette espèce pourtant éteinte a suivi bien des évolutions. L’œuvre paléontologique est presque devenue un sous-genre créatif. Qu’il soit apprivoisé et bardé d’armes dans Dino Riders, tout mignon dans Le Petit Dinosaure ou, évidemment, menace pour l’homme dans Dino Crisis, le grand reptile fascine. Mais le dernier Fallen Kingdom tente d’aller plus loin en apportant une nouvelle dimension à cette liste…
Aymeric Carron, sort de ce dinosaure
C’est après une introduction pas vraiment rêveuse que la véritable clef de voûte du film se pose. Ian Malcom (déjà, bien philosophe dans les deux premiers épisodes) soulève une question pertinente : la recréation des dinosaures est-elle bénéfique ou incontrôlable ? Avançant au passage que chaque invention de l’Homme finit par lui filer entre les doigts, comme… le nucléaire. Petit à petit Fallen Kingdom s’impose comme un film écologiste antispéciste. Le mot est lâché, et il parait fort pour un blockbuster. Pourtant, ce dernier Jurassic World ne tourne qu’autour de cette question : à présent que les dinosaures sont revenus, faut-il les sauver ou les condamner ? Ne sont-ils qu’une invention dangereuse ou une espèce en voie de disparition ? Pour une fois, la licence ne nous dit pas « Regardez, c’est chouette, les dinosaures », mais plutôt « Imaginez les véritables conséquences de l’existence de telles créatures, moralement parlant ». Il est d’ailleurs intéressant de voir que de ce point de vue, même le personnage féminin principal, Claire Dearing, peut-être finalement identifiée comme une « méchante » en quête de rédemption, puisqu’elle exploitait les dinosaures dans le fameux Jurassic World. Si toutes ces questions métaphysiques sont soulevées par le film, d’autres apparaissent également vers les dernières minutes. Notamment via un rebondissement que l’on espère avoir des conséquences scénaristiques dans le prochain épisode, tant cette idée parait délicieuse sur le débat éthique. À tel point que l’on se demande pourquoi les scénaristes n’ont pas exploré cette piste plus tôt.
Deux parties pour la deuxième partie d’une trilogie
On n’attendait pas tant de pistes métaphysiques de la part de Fallen Kingdom, et pour cause : c’est avant tout un blockbuster qui ne cache pas son nom. Si les bandes-annonces de Jurassic World se voulaient nostalgiques, ici, l’heure est à l’action. Pour arriver à ses fins, le film part sur les mêmes bases de Jurassic Park 3, à savoir prendre un personnage désabusé par ce qu’il a vu précédemment, et le faire replonger de force dans un parc jurassique. Cependant, si cette ficelle est très visible, les scénaristes ont été malins puisque Fallen Kingdom se divise en deux parties bien distinctes. Ce qui, malheureusement, en fait une œuvre bien bâtarde, les deux temps étant inégaux. Commençons tout d’abord par la deuxième section, qui est sans doute la moins réussie, car sans génie. Rien de véritablement intéressant ne transpire et même l’action parait molle. Il faut dire que cela ressemble fortement à ce que l’on a déjà vu dans l’opus de Steven Spielberg (la même séquence du vilain dinosaure qui, sûr de lui, se prend finalement le mur). Les meilleures scènes se trouvent donc dans le début, avec ce volcan qui semblait pourtant être une mauvaise idée. La première éruption nous fait en effet penser aux films catastrophe (ceux sur TFX, le samedi après-midi) auxquels on aurait greffé des dinosaures, histoire d’en rajouter une couche. Un véritable Pompéi du jurassique en somme. Si cela partait donc mal, les scénaristes ont réussi à rendre ce volcan particulièrement intéressant puisqu’imprévisible. Celui-ci entre en éruption même lorsque les personnages se trouvent dans une séquence bien précise et typique. On pense notamment à l’observation d’un camp pour s’y infiltrer, par exemple. Comme si tout n’était jamais joué d’avance, et que la donne pouvait changer à chaque moment. Une idée particulièrement intéressante qui s’éteint aussitôt que l’on s’en aperçoit, pour passer à la deuxième partie du film.
Jurassic World of the World
Ce concept qui ne va pas jusqu’au bout qualifie typiquement ce second opus que l’on devine aisément l’avant-dernier épisode de Jurassic World. La fin bien trop ouverte et ce rebondissement humain que l’on évoquait ne peuvent être laissés de côté. On espère que la suite, déjà prévue pour 2021, saura enfin développer à fond ses idées, quitte à imiter la récente trilogie La Planète des Singes. Cette saga avait réussi à placer des scènes d’actions autour des moments d’accalmie et non l’inverse, comme c’est trop souvent le cas. Le second épisode ne proposait d’ailleurs pas d’antagoniste stéréotypé, là où Fallen Kingdom en présente trois, que l’on sent venir à des kilomètres. Un film véritablement entre deux chaises donc, capable de pires clichés comme de pistes nouvelles.
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J’ai eu les mêmes impressions ! Super article, merci pour cette critique 👍