Starfield – Le boss du multivers


Critiques, Jeux Vidéo / dimanche, octobre 8th, 2023

Annoncé en 2018, Starfield aura mis bien plus de temps à être produit. Son développement commence à vrai dire en 2015, juste après la sortie de Fallout 4. Et l’affiliation entre les deux n’est pas que temporelle, tant les deux jeux se ressemblent. Oui : Starfield est un Fallout dans l’espace, avec ce que ça implique comme qualités et défauts. Cependant, Bethesda a poussé certains curseurs un peu plus fort que précédemment…

Bethesda Game Studios Present

Quiconque a déjà joué à un titre du studio (sauf IHRA Professional Drag Racing 2005, évidemment) ne sera pas dépaysé, aux premiers abords, par Starfield. Que ce soit par la création du personnage, par le système de compétences, par son moteur Creation Engine (perfectionné pour l’occasion), ses dialogues, ses sensations de tirs un brin laborieux et cette vue à la troisième personne utilisée par personne.

Sans doute influencés par Fallout 4, les développeurs ont toutefois poussé certaines idées de ce jeu un peu plus loin. Les établis sont bien plus nombreux, permettant d’améliorer les armes, les combinaisons, de cuisiner, faire des recherches, et concocter des médicaments.

L’ergonomie, perdue dans l’espace

On s’y perd donc un peu. Et Starfield ne nous épargne pas pendant au moins les trois premières heures. Puisqu’à cela, il faut rajouter également beaucoup d’effets possibles (radiations, température, choc corporel, maladie, brûlure…) et ses soins pour y pallier.

On discerne presque l’aspect jusqu’au-boutiste de Red Dead Redemption 2, avec toutes ses jauges. Si ce dernier avait créé de nombreux débats à ce sujet, la volonté de réalisme de Starfield est encore plus problématique, car entachée par un manque d’explications claires et détaillées sur toutes les possibilités du titre, et surtout, sur de nombreux soucis d’ergonomie. Il faudra par exemple passer par l’inventaire pour mettre sa combinaison sur une planète hostile, soit 5 clics. Oh, il y a bien un inventaire rapide… beaucoup plus limité que Skyrim. De même, impossible de faire un voyage rapide depuis un intérieur ou si le vaisseau est amarré.

 

Ceci est la carte d’une ville…

Juste un peu plus près des étoiles

On touche d’ailleurs le gros point sensible du titre. Imaginez qu’un jeu s’appelant Starfield… soit totalement raté dès que l’on sort de l’atmosphère. Les mécaniques liées sont en effet très décevantes. Ne pensez pas pouvoir voguer de planète en planète (aussi long que cela puisse être) : le moteur ne le permet pas. Au lieu de cela, on « saute » de galaxie en galaxie, plus ou moins loin, selon la taille du vaisseau. Il n’est donc pas rare de faire plusieurs voyages rapides pour atterrir sur la bonne planète. D’autant que tout se fait sur une carte 3D (espace oblige) assez confuse, sur console en tout cas.

Ne comptez pas non sur les dogfights, qui sont seulement correctes. Au niveau des bons points, on retrouve le très bon système de Star Wars Squadrons, qui permet de choisir si l’on préfère booster, le moteur, les armes, le bouclier, etc. Mais en dehors de ça, les affrontements sont plutôt plats, et quasi toujours en 1 contre 3.

 

Les planètes au trésor

Une fois revenu sur une terre ferme, c’est cette fois-ci l’un des très bons points que l’on rencontre. La notion d’exploration est particulièrement forte chez Starfield. D’après les joueurs aguerris, le titre de Bethesda contiendrait très exactement 1692 planètes, réparties sur 120 systèmes solaires. Il y a de quoi faire, et on a presque envie d’arpenter chaque sphère géante, scanneur à la main, afin de recenser les espèces, minéraux et autres spécialités locales. L’immersion en tant qu’explorateur spatial est totale.

Évidemment, l’entièreté de la surface des globes n’est pas parcourable, et la plupart de ces mondes ont été générés procéduralement. Cet aléatoire est cependant finement limité, ce qui est un mal pour un bien. À la fois, il n’y a pas d’étrangeté digne des débuts de No Man’s Sky, de l’autre, bon nombre de planètes sont ternes et sans personnalité propre. Comme dans la réalité ?

 

RPG avant tout

On l’a dit, Starfield est avant tout un jeu Bethesda, ce qui veut forcément dire composantes RPG. On notera donc un éditeur de visage plus limité qu’auparavant (le générateur de laideur d’Oblivion est décidément bien enterré), mais une carte de personnage plus intéressante. Le jeu nous proposera dès lors de choisir une identité (chasseur de prime, fermier, soldat, géologue, crapule, etc.) débloquant ainsi quelques compétences de base, et surtout une immersion directe dans la peau de notre personnage. Rajoutons à cela quelques traits liés à notre passif pour pimenter le gameplay, comme des bonus pour les solitaires, envoyer de l’argent chaque semaine à ses parents, payer un loyer…

Comme toujours chez le studio, le système de compétence a été revu. Une capacité débloquée s’améliore sur quatre paliers, en l’utilisant, à la manière d’Oblivion. Cependant, cette fois-ci, outre un habillage carte évolutive façon Urban Rivals, les compétences sont rangées par catégorie et surtout par ligne. En quelques mots, on est sur un système qui oscille entre Oblivion et Skyrim, pour un résultat convaincant.

 

L’histoire, ou les deux paragraphes qui divulgâchent (vraiment)

Impossible de passer outre l’histoire de Starfield. Celle-ci étant à l’image du jeu : un ascenseur émotionnel. Une fois traversée l’introduction particulièrement Bethesdaïenne (in media res dans un univers clos et étouffant avant de sortir et libérer ainsi le gameplay), le jeu enchaine les missions principales autour d’un thème pas forcément passionnant, car vu mille fois. Nous voici donc partis à la recherche d’artefact mystérieux qui donnent des pouvoirs, façon enfant de Dragon. Chaque découverte est évidemment enrobée d’une histoire, rarement intéressante.

Et puis vient la moitié de l’intrigue principale. Un retournement de situation qui bascule le jeu dans la thématique décidément trop actuelle des multivers. On découvre ainsi que le peuple qui nous met des bâtons dans les roues n’est autre que des personnes traversant les multivers en quête de puissance. Et quand les dernières heures de la trame principale approchent, on a beau le voir venir, on se demande si Bethesda va prendre la direction espérée. Effectivement, les scénaristes arrivent à un tour de force, celui de questionner le jeu vidéo tout en mêlant le gameplay. Arrivée à la fin, une question se pose : le new-game + est-il une porte virtuelle du multivers ? L’affirmation qui semble suivre donne le sentiment que l’utilisation de cette thématique ne pourra jamais être égalée dans ce médium.

 

Au Starfield de la nuit

Gigantesque terrain de jeu, des quêtes à ne plus savoir quoi en faire, et une immersion plus que jamais réussie contrebalancent avec une ergonomie horripilante et un espace limité.

Starfield n’est pas space-opera, et encore moins une simulation spatiale. C’est une montagne russe, un long Space Mountain, capable d’être au plus haut, avant de redescendre dans les limbes du pire gameplay, pour mieux se stabiliser dans un écosystème déjà vu, mais efficace. Et quand vient la fin du manège, c’est un ticket gratuit qui nous attend.

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