Atomic Heart – Le champion reste champion


Critiques, Jeux Vidéo / mercredi, avril 5th, 2023

Celui que l’on a tant appelé « le Bioshock en Russie » aura fait beaucoup parler de lui à sa sortie et pas pour les meilleures raisons. Une machine sexuelle anecdotique, une phrase prise hors contexte, un titre qui parle d’une U.R.S.S. forte alors qu’une triste guerre fête son premier anniversaire… Loin des tempêtes Twitter dans un verre d’eau, intéressons-nous au cœur de l’explosion.

Oui, c’est Bioshock…

Crevons effectivement cet abcès tout de suite, puisque ça suinte dès le lancement du jeu. Pendant ce magnifique prologue où l’on découvre une U.R.S.S. dystopique de 1950 transcendé par un communisme victorieux et qui la propulse technologiquement pour devenir le leader mondial, devant des Etats-Unis à la traine. On nous promène donc dans une ville prometteuse, où myriades de robots, avancées techniques et gens heureux nous sont montrés… avant que tout dérape. Exactement à la manière des Bioshock d’Irrational Games, tout en présentant un contexte opposé. Si Bioshock nous démontrait les dérives d’un libéralisme à l’excès dans un monde occidental, Atomic Heart nous décrit les coulisses d’un collectivisme total et idéaliste, mais complètement bancal.

Il n’y a pas que la dystopie technologique qui rappelle Bioshock. À vrai dire, tout y est, et Mundfish ne s’en cache pas. On retrouve même un système de pouvoirs sortant de nos mains, tels les affreux plasmides. Ils sont, hélas, beaucoup moins nombreux et surtout moins inspirés que ceux de Bioshock, à l’image du reste du jeu.

… mais en 2023

Loin de créer une copie de la licence d’Irrational Games, Mundfish s’applique à fonder un cadre moderne pour son FPS/jeu de rôle. En premier lieu, le personnage n’est pas mutique comme les deux premiers Bioshock, mais nous inonde plutôt de ses commentaires, ainsi que ceux de son gant qui parle, nommé Charles. Atomic Heart est effectivement extrêmement bavard, peut-être trop pour son bien et se paie même le luxe de cutscenes de temps à autre.

Que serait un jeu vidéo de 2023 sans monde ouvert ? Une hérésie commerciale, semble répondre Mundfish, qui nous propose en effet de pouvoir se dégourdir les jambes dans une vaste zone, entre deux bunkers soviétiques. Une bonne idée de modernité, malheureusement anecdotique, puisque ces séquences ne sont clairement pas intéressantes et sont loin de faire partie des plus beaux décors. C’est sans doute sur le gameplay même que l’on retrouve les meilleures révisions de ce sous-genre. Que ce soit dans la modification/création d’armes ou dans le maniement de celles-ci, on sent dix ans d’évolution vidéoludique. Le corps à corps est particulièrement mis en avant, avec son système d’esquive et ses timings serrés, très à la mode en ce moment. Il en résulte des affrontements bourrins (l’infiltration est très rare ici), mais qui demandent tout de même de ne pas se précipiter.

Bombe atomique

On pourrait craindre que le début d’Atomic Heart ne soit qu’une explosion visuelle avant de laisser place à un champignon vénéneux graphique, mais il n’en est rien. Le jeu de Mundfish est véritablement magnifique de bout en bout. Tant sur le plan technique (malgré de vilains bugs de collisions) que sur le plan artistique.

Sur ce point, les développeurs nous livrent tout un imaginaire que l’on avait rarement, voire jamais, vu auparavant. On pense à ces robots moustachus, aux infectés végétaux de The Last of Us totalement revus et plus abjects, ou encore au polymère. Une matière étrange, sorte de résine vivante et parfaitement ignoble. L’architecture témoigne également d’une vision d’une U.R.S.S. à la fois merveilleuse et fondamentalement dégoulinante. Un cauchemar éveillé sans tomber dans l’horreur.

À un atome près

Hélas, Atomic Heart est pétri de bonnes intentions, veut bien faire, mais se rate sur beaucoup de choses. Le scénario est très prometteur sur les premières heures et donne envie de s’immerger, avant que l’on comprenne où celui-ci veut en venir. L’évolution mentale du personnage, aussi beauf qu’un Duke Nukem sur le début, pour finir en victime d’un monde qui le manipule, est noyé sous des lignes de dialogues (bien doublés néanmoins).

L’univers est absolument magnifique, et prometteur, mais les types d’ennemis sont peu nombreux et très semblables. Par ailleurs, l’ambiance sonore est superbe et très portée sur le classique, mais nous impose de la dubstep ignoble durant les combats, ce qui jure avec le reste du jeu. Atomic Heart tente toujours de dépasser son modèle, n’en est jamais très loin, mais se fait distancier chaque fois. La promesse d’un Bioshock moderne, sans en atteindre l’antique génie.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *