Mine de rien, Mission Impossible monte petit à petit. Après deux premiers épisodes expérimentaux, Tom Cruise (producteur depuis le début) a trouvé la recette gagnante. Désormais établie, la licence se veut plus profonde. Si Rogue Nation avait esquissé cette envie, Fallout enfonce le clou.
L’échec est une option
Dès les premières minutes, le film dévoile son fil rouge implicite. Il ne s’agit pas tellement de Solomon Lane (Sean Harris), ni des nouveaux méchants du coin, les Apôtres, mais plutôt l’angoisse de l’échec. C’est ce dernier mot qui résonne le plus à travers Fallout. Ethan Hunt (Tom Cruise) sera marqué par plusieurs revers successifs plus ou moins importants que l’on ne spoilera pas (trop) ici. C’est la première fois que ce personnage est aussi malmené, presque brisé parfois. De la surenchère ? On serait tenté de dire oui tant Fallout se veut plus grand que tous les films de la saga, mais ce ne serait pas tout à fait vrai. L’intérêt réside dans l’approfondissement du personnage. Connaître ses peurs, ses failles, et ne plus voir qu’un simple homme d’action. De manière générale, on sent que ce dernier opus tente de créer une véritable mythologie Mission Impossible. Le mot peut sembler un peu gros, pourtant il faut voir comme les personnages secondaires tiennent une place plus grande cette fois-ci. Ils ne sont plus de simples pions dans la vie de Hunt ; sans pour autant trahir les anciens films, loin s’en faut, et c’est l’une des surprises de cet épisode. Si cette mythologie se développe, on retrouve évidemment les éléments récurrents de la franchise, comme le Face Maker et son utilisation toujours à la limite de l’abus, ou encore le thème musical principal, encore une fois remaniée. C’est d’ailleurs l’occasion de parler rapidement de la bande-son, qui sait à la fois se démarquer (le passage avec la policière ou l’attaque du fourgon : brillants) tout en restant dans les tons classiques du genre par moment.
Mais l’univers de Mission Impossible c’est avant tout Ethan Hunt, ou plutôt Tom Cruise. Il n’y a que cette saga qui réussisse autant à perdre le spectateur entre le réel et la fiction. On navigue sans jamais avoir la certitude que ce fait Tom Cruise à l’écran est réel ou non. Si la promotion du film s’est en partie fait grâce à un accident de tournage suite à un saut de toit. L’acteur nous a caché plusieurs autres moments de bravoure/folie (mention spéciale à la course poursuite… à pieds !). C’est sans doute le véritable atout de Mission Impossible, faire de Tom Cruise le héro du film. Hormis peut-être Robert Downey Jr/Tony Stark, rares sont les acteurs à être aussi proche de leur personnage, à tel point qu’on ne voit plus qu’eux. C’est une force, dans la mesure où il ne reste plus que de la spontanéité, du réel.
Trop c’est trop
Cette critique est en deux parties bien distinctes, à la manière du film. Car il y a une véritable césure dans ce Mission Impossible. Alors que tout semblait fini, l’action repart de plus belle. Cela pourrait être un avantage (après tout, jusque là c’était très bon), mais Fallout se veut éreintant, il veut nous couper le souffle à tel point que même les moments d’accalmies sont de véritables duels psychiques. On l’a compris, Fallout se veut plus grand, et donc aussi plus spectaculaire, soit. Hélas, le film se perd vers la fin dans une succession rapide de rebondissements. Finalement, on commence à ne plus y croire, ne voyant désormais plus qu’Ethan Hunt, un héros lambda faisant des trucs déjà faits ailleurs, mais en plus abracadabrants. Cette malchance incroyable dont fait preuve le personnage nous rappelle d’ailleurs immanquablement penser au jeu Uncharted, et notamment au deuxième opus et son train, pour les connaisseurs… On retrouve au passage dans les deux œuvres la même volonté de dépaysement. Tom Cruise l’a dit, il veut cette saga comme autant de cartes postales. Mission Impossible va plus loin qu’un James Bond en mettant toujours en valeur les lieux où l’on nous conduit. Ici, c’est Paris.
Notons également quelques redites qui chiffonnent. Notamment le personnage d’Ilsa qui joue encore une fois (c’était déjà le cas dans Rogue Nation) la Mata Hari moderne. À savoir une agente double qui ne sait plus vraiment dans quel camp elle est. Soit le cliché on ne peut plus éculé de l’espionne. L’autre chose plus dérangeante, c’est la redondance de certaines scènes, on pense notamment à la poursuite en moto qui semble tout droit reprise du film précédent, en plus long et incroyable, mais sans pour autant se réinventer. Dans le même genre, la course-poursuite à Paris (en voiture cette fois) nous rappelle celle de La Mémoire dans la Peau. C’était évidemment un grand risque puisqu’on retrouve tous les éléments du film, peut-être parfois au plan prêt.
Des détails pour certains, mais cela nous a tout de même refroidi en sortant de la salle. Cela n’empêche pas Mission Impossible de contenir, il faut absolument le préciser, deux des meilleures scènes d’actions depuis au moins cinq ans. On pense à cette course improbable à Londres et à cette rixe à trois dans Paris. Aussi brutale qu’inattendue, sur bien des plans. Un peu comme le film, on aurait envie de déclarer, pour conclure parfaitement.
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